Chapitre 80

Publié le par Charles

 

 

Léonard revenait du centre médical du Renouveau, où il avait laissé Akira et le pilote et se dirigeait vers le bureau de son bras droit pour avoir des informations sur ce qu’il s’était passé pendant son absence. La porte de celui-ci était ouverte lorsqu’il arriva, il entra et vit Thomas’ en train de lire un écran portable à l’intérieur. Ce dernier en voyant quelqu’un rentrer leva les yeux,

    Léonard ! Je t’attendais, comment vas-tu ? dit Thomas’ en se levant pour aller le saluer.

    Un peu fatigué, mais ça va, je n’ai pas à me plaindre comparé à Akira ou à notre pilote.

    Ils vont mieux ?

    Akira pourra marcher dans quelques jours, il est dans l’incubateur réparateur. Par contre pour le pilote cela devrait prendre plus de temps, mais il devrait se remettre aussi.

    Tant mieux, dit Thomas’ King.

    Oui, répondit Léonard.

    Tu préfères que l’on commence par quoi ? Je te dis ce qu’il s’est passé ici ou tu me racontes ce que vous avez fait ?

    Commence, dit Léonard en s’asseyant sur une chaise.

    D’accord, j’ai plusieurs choses à te dire. Avant tout il faut que tu saches que Patrice Jik a été assassiné…

    Comment ? s’étonna Léonard Rei.

    Oui, une femme l’a poignardé dans le dos, puis dans le cœur.

    Qui a fait le coup ? demanda Léonard.

    Pour la planète entière c’est le Renouveau…

    Comme d’habitude, reprit Léonard.

    Mais sinon tout porte à croire que ce serait soit la Galaxy Corporation, soit les Téléligueurs qui auraient organisé l’assassinat.

    Pourquoi la Galaxy Corporation le tuerait maintenant ? Cela faisait plus de vingt ans qu’il était contre eux, alors pourquoi seulement maintenant ? Non je pense que c’est un coup de Frédéric Cino.

    Mais de toute façon tu avais dit que Cino était une taupe des fabricants de téléporteurs, ils pourraient avoir préparé cela ensemble, dit Thomas’.

    Oui, peut-être, mais cela ne m’étonnerait pas que ce soit une idée du chef des Téléligueurs… Pauvre vieux Jik…

    Oui…

    Quoi d’autre ? demanda Léonard.

    Et bien il y a le cambriolage dont je t’ai parlé. En résumé, trois gardes ont été tués, les téléporteurs ouverts ou reconstitués ont été volés, les algues que nous conservions aussi et nous avons un traître qui a pu effacer les données du système de surveillance en se faisant passer pour un dirigeant de niveau 1..

    Il faut absolument que l’on trouve qui est le traître pour que cela ne se reproduise pas. Il doit probablement envoyer des informations sur tout ce que nous faisons…

    J’y travaille, répondit Thomas’. Je me demande pourquoi ils ont aussi pris les algues. J’ai vu aux informations des reportages sur des téléporteurs draineurs d’eau qui disparaissaient, puis réapparaissaient à la dérive couverts de ces algues, un peu comme les bateaux. Ils n’avaient pas besoin des nôtres…

    Ils ne voulaient probablement pas que nous les étudiions trop, s’ils se sont rendu compte de leur capacité. Ou alors ils n’ont pas prêté attention tout de suite aux algues qu’ils avaient, et ce serait l’espion qui leur aurait dit de les dérober pour savoir en quoi ces algues nous intéressaient…

    Sinon ce n’est pas tout, j’ai peut-être une piste sur l’espion… reprit Thomas’.

    Vraiment laquelle ? demanda le leader du Renouveau.

    J’ai été informé la nuit dernière que Paméla Maier était sortie du Grand Dubaï en plein milieu de la nuit. Je l’ai moi-même suivie et je l’ai surpris en train d’essayer d’envoyer une lettre par un téléporteur.

    Hum… par un téléporteur…

    Oui, je lui ai pris la lettre et je lui ai dit de retourner dans sa chambre et de ne pas en sortir. Elle n’a pas bougé depuis. J’attendais que tu reviennes pour savoir ce que nous devions faire.

    Tu as la lettre ici ? demanda Léonard, j’aimerais la voir.

    Oui elle est là, répondit Thomas’ en lui donnant une enveloppe ouverte qui se trouvait sur son bureau.

Léonard sortit la lettre de l’enveloppe que son assistant avait ouverte la nuit même et lut ce qu’il y était écrit. Lorsqu’il eut fini le recto, il regarda le verso qui était vierge.

    Une simple lettre à ses parents, dit Léonard d’un ton pensif.

Thomas’ vit que son supérieur et ami était en train de réfléchir et ne dit rien.

    Tu sens ? demanda le leader du Renouveau.

    D’ici je ne sens rien, répondit Thomas’, mais je sais que la lettre est parfumée.

Léonard mit son nez sur la lettre, puis sur l’enveloppe. Il regarda bien la lettre, la retourna et sentit à nouveau.

    Tu as un briquet ?

    Non mais attends je connais quelqu’un qui en a un, Bobby !

Un chien de métal arriva en courant dans le bureau de Thomas’, il s’arrêta devant lui en remuant la queue.

    C’est bien Bobby, c’est un bon chienchien ça ! Tu peux me donner du feu s’il te plait ?

Le chien fit le beau et une flamme sortie de sa patte gauche.

    Voilà, dit Thomas’.

Léonard approcha le papier de la flamme. Thomas’ se demanda pendant un moment si son supérieur n’était pas sur le point de détruire une preuve pour défendre Paméla’, mais lorsqu’il vit apparaître une écriture sur le verso de la feuille, il comprit que ce n’était pas le cas.

    Comment tu savais qu’un message apparaîtrait en brûlant la lettre de ce côté-là ?

    C’est un message en jus de citron, je me suis demandé si le fait de parfumer la lettre ne servait pas à dissimuler autre chose. Avec son parfum Paméla a voulu cacher la légère odeur du jus de citron qu’elle avait utilisé pour écrire au verso.

    Bravo… Pour être franc, je ne savais même pas que l’on pouvait écrire comme cela.

    C’est un très vieux moyen d’écrire des choses sans que n’importe qui puisse les voir. Quand j’étais petit mon grand-père m’envoyait des lettres avec des messages cachés comme ça, c’était beaucoup plus amusant à lire qu’une lettre normale.

Léonard termina de bien passer la flamme le long de toute le feuille pour être sûr de ne pas rater une annotation dans un quelconque coin. Ensuite il fit signe à Thomas’ qu’il n’avait plus besoin de feu et ce dernier dit à son chien d’aller jouer avec les autres. Le chien fit disparaître la flamme qui sortait de sa patte et repartit en remuant la queue.

    Il est mignon, dit Thomas’ en le regardant partir.

Léonard sourit à son assistant et lut la lettre en silence.

    C’est une lettre à Alberto D’Alino, Paméla y dit qu’elle ne pense pas que nous soyons les meurtriers de Jik et lui raconte ce qu’il nous est arrivé au sujet de l’intrusion. Elle finit en lui disant que les Grands Océans devraient peut-être réfléchir au fait de rejoindre le Renouveau.

    Ah… c’était plutôt une bonne lettre alors…

    Nous savions qu’elle était probablement une espionne D’Alino, il n’y a pas de grande surprise en fin de compte, dit Léonard.

    C’est dommage qu’Alberto n’ait pas pu recevoir ce mot, je suis désolé, dit Thomas’, je ne savais pas.

    Ne t’en fait pas, lui répondit Léonard. Allons voir Paméla nous devrions pouvoir nous entendre.

Les deux hommes allèrent ensemble au Grand Dubaï accompagnés d’une horde de chiens-robots que Thomas’ avait décidé de promener en même temps.

Lorsqu’ils rentrèrent dans l’hôtel ce dernier dit à ses chiens de retourner l’attendre chez lui. Ils prirent l’ascenseur, montèrent au cinquième étage et frappèrent à la porte de la chambre de Paméla’ qui vint leur ouvrir.

    Bonjour Paméla, dit Léonard.

    Bonjour, répondit Paméla’ mal à l’aise en leur faisant signe d’entrer.

Alors que les deux hommes avançaient, elle vit que Léonard tenait dans sa main la lettre que Thomas’ lui avait prise et que le message en jus de citron avait été révélé.

    Vous savez pourquoi nous sommes là, dit Thomas’.

    Je m’en doute, répondit-elle.

    Comme vous pouvez le voir nous avons pu lire le message que vous adressiez à Alberto D’Alino, lui dit Léonard en montrant la lettre.

Paméla’ était très pâle, tout le monde savait maintenant qu’elle était une espionne pour un autre mouvement.

    Je… Je suis désolée… Que va-t-il m’arriver maintenant ?

    Et bien nous aimerions que vous réécriviez la même lettre et que vous l’envoyez cette fois.

Paméla’ regarda les deux hommes avec de grands yeux.

    Oui, reprit Léonard, nous apprécions beaucoup le message que vous avez voulu faire parvenir au chef des Grands Océans et nous voulons qu’il le reçoive.

    D’accord, je vais le réécrire, dit Paméla’, je l’enverrai ce soir à la même heure que j’allais l’envoyer cette nuit pour que cela fasse plus naturel.

    Très bonne idée, dit Léonard. Je pense qu’Alberto vous a demandé de lui envoyer ce que vous saviez parce que depuis l’assassinat de Jik, il ne sait plus quoi penser.

    Peut-être, on m’a juste demandé de lui remettre un rapport, sans rien me dire de plus.

    Qui vous a demandé cela ? demanda Thomas’ suspicieux, il y a d’autres espions des Grands Océans à Dubaï ? ou des contacts à eux ?

Paméla’ baissa les yeux sans vouloir répondre ayant peur qu’en disant la vérité ils ne la laissent plus avoir de visite des membres de sa famille.

    Ce n’est pas grave, dit Léonard. Grâce à votre lettre les Grands Océans vont probablement nous rejoindre, vous pourrez alors retourner avec eux au lieu de rester ici.

Paméla’ ne s’attendait pas à cela.

    Je vais devoir quitter Dubaï ? demanda-t-elle. Nous n’allons plus nous revoir ?

    Nous nous reverrons lorsque nous ferons des réunions avec tous les mouvements du Renouveau, comme celle dans laquelle vous vous êtes présentée à nous, lui répondit Léonard.

    Mais je pensais que comme pour les ingénieurs ou pour moi tout le monde allait venir ici à Dubaï, dit-elle d’une voix triste.

    Non, seuls les chercheurs du mouvement appelés les Ingénieurs sont venus ici, pas toutes les personnes qui adhèrent à leurs idées. D’ailleurs si Alberto D’Alino souhaite venir il sera le bienvenu. Mais nous n’avons pas suffisamment de place pour accueillir tout le monde. En plus la plupart des adhérents ne souhaiteraient pas venir ici, ils sont bien chez eux et ne connaissent pas Dubaï.

    Mais alors pourquoi est-ce que vous m’avez proposé de venir ici, demanda-t-elle ?

Ce fut Thomas’ qui lui répondit,

    Nous avons un dossier sur tous les assistants des leaders de la Ligue Originelle. Lorsque vous étiez venue à notre rencontre, je me suis tout de suite rappelé de vous et je me suis souvenu que j’avais pu lire que vous étiez quelqu’un de très intéressant et d’intelligent.

    Oui, reprit Léonard, nous pensions que vous pourriez devenir un maillon important des Terres Bleues.

    Mais pourquoi est-ce que je ne le suis pas devenue alors ? Je n’ai rien fait à part apprendre à conduire et profiter de la ville depuis que je suis ici. Tout ce que je sais je l’ai appris par d’autres membres du Renouveau.

    Parce que nous nous doutions que vous étiez encore au service des Grands Océans, après la conversation que vous aviez eu avec Thomas’ et votre rapide changement d’avis qui la suivit.

Paméla’ se rendit ainsi compte que sa mission avait été un échec complet et qu’avant même d’arriver à Dubaï elle avait été démasquée.

    Il n’y a plus aucune chance pour que je puisse rester vivre ici et devenir ce maillon important que vous vouliez que je devienne, n’est-ce pas ?

    Vous vous rendez compte que vous ne savez vraiment pas ce que vous voulez ? lui dit Thomas’ sans agressivité. D’un côté vous voulez rester Grands Océans et de l’autre vous voulez monter dans le Renouveau.

    Mais si les Grands Océans rejoignent le Renouveau cela devrait être possible n’est-ce pas ?

    Ce n’est pas aussi simple, reprit Thomas’. Nous savons que votre loyauté est envers Alberto D’Alino et non pas envers nous. Il est donc normal que vous restiez sous ses ordres dans ses propres locaux, même s’il venait à nous rejoindre.

Léonard n’avait pas cessé de fixer les réactions de Paméla’ et intervint,

    Finalement il y aurait bien une solution pour que vous puissiez rester ici et preniez un rôle de la taille de celui que nous vous destinions au début.

    Comment ? demanda immédiatement Paméla’ en relevant les yeux vers le leader du Renouveau.

    En faisant croire à Alberto D’Alino que vous n’avez pas été découverte et que maintenant que nous vous connaissons plus nous allons vous donner des informations plus importantes pour qu’il vous laisse dans votre mission d’infiltration même s’il nous rejoint.

    Et s’il demandait que je le rejoigne chez les Grands Océans ? demanda Paméla’.

    Vous devez bien vous rendre compte que s’il nous rejoint il vous sacrifiera.

    Pourquoi ? demanda Paméla’ surprise.

    Parce qu’il ne pourra jamais vous reprendre s’il nous rejoint. Ce serait admettre qu’il nous a espionnés, ce qui ne serait pas très bon pour commencer une nouvelle alliance. Autrement dit, soit vous restez une espionne infiltrée parmi nous, soit vous sortez du Renouveau comme des Grands Océans qui ne vous accepterons sûrement pas puisque vous les avez trahis auparavant, dit Léonard.

    Mais je ne les ai pas trahis, vous le savez maintenant, répondit Paméla’.

    Nous le savons, reprit Léonard, mais qui d’autre que D’Alino et les personnes présentes dans cette chambre sont au courant ?

    Personne… répondit Paméla’.

    Vous comprenez maintenant ? demanda Léonard.

    Je n’arrive pas à croire que Monsieur D’Alino soit prêt à me laisser de côté comme cela, dit-elle.

    Ce n’était probablement pas ce qu’il voulait faire au début lorsqu’il vous a envoyée, mais maintenant s’il veut nous rejoindre il est dans une situation relativement complexe et il n’a pas beaucoup le choix, lui dit Léonard.

Paméla’ ne répondit rien, réalisant la situation embêtante dans laquelle elle était.

    Ce que je vous propose donc serait de lui faire croire que vous êtes encore son espionne, mais en fait d’être la nôtre.

    Comment ça ?

    Vous lui enverrez des informations que nous sélectionnerons, rien de plus, rien de moins. Vous nous accompagnerez lors de nos prochains déplacements pour qu’Alberto voit que nous avons maintenant confiance en vous. Ensuite vous pourrez aller nous représenter dans des réunions où vous serez proche de lui et où le contact sera possible. Il cherchera à vous soutirer des informations pour savoir si nous lui cachons des choses, vous lui direz alors ce que nous vous aurons dit de lui dire et essaierez de votre côté d’apprendre un maximum sur lui, sur ce qu’il fait et ce qu’il compte faire.

    Mais ce sera suspect, fit remarquer Paméla’.

    Non, vous lui direz que vous avez besoin de savoir où en sont les Grands Océans et ce qu’ils veulent faire pour que vous puissiez vous concentrer sur ce qui les intéresse le plus.

    D’accord… dit Paméla’, je serai une espionne à vos ordres, dit-elle en regardant Léonard dans les yeux.

    Je repasserai demain pour avoir votre réponse, dit-il en se dirigeant vers la sortie.

    Mais je viens d’accepter, dit-elle.

    Oui, mais je sais que vous pouvez décider quelque chose très rapidement et changer d’avis ensuite. Je vous laisse donc vingt-quatre heures pour bien réfléchir à tout cela avant de vous décider, lui dit Léonard en souriant.

 

 

Publié dans Livre: Terre Bleue

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